Les caractéristiques d’une bonne roue!

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Non, je ne parle pas ici de roue au sens matériel, mais bien des termes qualitatifs que l’on s’attribue, entre cyclistes. Je fais le survol des caractéristiques “d’une bonne roue à suivre”, ainsi que celles associées à l’expression “rouler tout croche”…

Bien que le cyclisme soit un sport d’équipe, on le conçoit plutôt comme un sport individuel, pratiqué en groupe… Cette petite différence peut expliquer le manque d’aisance chez certain(e)s, à rouler collectivement. Outre les règles de signalement officielles au sein d’un club de vélo, il y a un ensemble de principes et facteurs physiques à intégrer et appliquer… Bonne lecture!

Mise en situation

Imaginez un groupe de 8 cyclistes, ayant tous un niveau de performance légèrement différent, de l’ordre de 10-20% de variation (ex : 200-270w de FTP). Imaginez ce même groupe, prenant part à une sortie de 150km. À travers celle-ci, devraient-ils :

  • (A) Prendre des relais de même durée (ex : 3 minutes pour tous) en ajustant l’intensité relativement à leur propre niveau d’effort?

    OU

  • (B) Maintenir la même intensité, tout en ajustant la durée des relais (ex : relais allant de 20 secondes pour certain(e)s, jusqu’à 10-15 minutes pour d’autres, et ce, au sein du même groupe)?

Si vous êtes de l’avis que (A) est la bonne réponse :

  • Vous acceptez qu’il y ait des changements de rythme, donc de multiples accélérations & décélérations à travers la sortie, augmentant le nombre de “cassures” au sein du groupe.

  • Vous acceptez que les cyclistes ayant une capacité physique moindre travaillent proportionnellement plus fort à travers la sortie, comme ils/elles consacrent le même % de temps à l’avant/l’arrière, mais doivent générer plus de puissance relativement à leur capacité, une fois dans les roues.

    • Pas sûr de comprendre? Imagine passer 5 heures collé à la roue de Thomas De Gendt… Il se peut fort bien que tu termines la sortie plus fatigué que lui, même si tu économises 30% d’énergie, en moyenne!

Si vous êtes de l’avis que (B) est la bonne réponse :

  • Vous comprenez l’importance de rouler à un rythme constant, tant pour la sécurité, la tranquilité d’esprit, ainsi que l’optimisation de vos efforts collectifs (si votre but est de parcourir une distance X en optimisant la vitesse de déplacement & l’effort collectif)

    • Un rythme constant ne veut pas dire une vitesse constante… (explications plus bas)

  • Vous comprenez que placés dans votre roue (ou vice-versa), certain(e)s cyclistes doivent générer le même effort relatif que le vôtre, ce qui implique de possiblement passer l’entière durée d’une sortie à l’avant ou intercallé dans les roues.

    • Prendre le “pouls” de chacun(e), en communiquant son niveau d’aisance à maintenir le rythme, est la clé pour maintenir la synergie d’un groupe.

“Faire l’accordéon”

Ce phénomène survient lorsque des changements de rythme prennent place (occasionnant accélérations / freinages brusques / cassures, etc.) et malheureusement, il est en cause dans beaucoup trop d’accidents facilement évitables. Phénomène présent en situation de compétition et au sein d’un peloton de 50-100+ coureurs, celui-ci ne devrait pas avoir sa place dans de petits groupes de cyclistes récréatifs. Voici quelques principes de bases à respecter lors de vos prochaines sorties, et ce, afin de diminuer son incidence :

  • Lorsqu’un espace (Gap) se forme entre vous et le cycliste tout juste à l’avant, tâchez de combler l’écart sans accélération brusque. Optez plutôt pour un effort soutenu, assis et en contrôle…

    • Anticipez les effets de vos accélérations! Si vous avez à freiner brusquemment suite à une accélération pour combler un écart, c’est que vous avez surestimé l’énergie nécessaire pour combler celui-ci. Prenez en compte la distance qui vous sépare et apprenez à jauger l’effort nécessaire pour qu’à la longue, vous n’ayez pas à utiliser vos freins, dans ce type de situation.

  • Lorsque dans les roues et sur un parcours plat, adoptez un braquet ni trop lourd, ni trop léger, qui vous permet de continuellement tourner les jambes. On veut être en mesure de garder le rythme imposé sans avoir à alterner entre quelques coups de pédales saccadés (accélération) et du “freewheel” (arrêt de pédalage).

    • De la sorte, on évite les petites variations de distance entre chacun(e)s des cyclistes et ainsi, une plus grande fluidité + confiance au sein du groupe. On peut aussi remédier à cette situation en imposant un rythme plus soutenu à l’avant! (explications plus bas)

  • Lorsque vous êtes la 2e roue au sein d’un groupe et que vous prenez l’avant-poste, et ce, sans changement de terrain, nul besoin de modifier à la hausse votre braquet…!!! Maintenez votre vitesse + cadence et le rythme du groupe en sera tout autant!

    • Ça arrive trop souvent et c’est pourtant si simple! Si vous êtes en 50/15 @90rpm (37.7km/h) en 2e position et que vous prenez le relais… votre vitesse sera la même, mais vous devrez générer davantage de puissance pour combattre la friction d’air additionnelle… pourquoi rendre ça encore plus difficile, ainsi que briser le rythme du groupe? SVP, ne pas mettre une dent de plus lorsque vous prenez le relais, ou du moins, attendez minimalement 20-30 secondes et répartissez votre accélération sur une plus longue durée!

“Rouler au train” ou “rouler tout croche”

Les caractéristiques qui définissent comment se comportent les trains de marchandise :

  • N’effectuent aucun mouvement latéraux (stay on track)

  • Doivent anticiper longtemps d’avance les changements de voies / direction.

  • Maintiennent le même rythme sur de longues distances

  • sont prévisibles (aucune accélération / décélération brusque)

Ces caractéristiques peuvent aussi être appliquées aux comportementx des cyclistes, faisant d’eux des personnes avec qui nous avons un désir accru de rouler, puisqu’ils inspirent la confiance, la sécurité et beaucoup de kilomètres gratuits ;)

À l’inverse, les comportements ci-dessous témoignent de ce qu’on ne veut pas reproduire lorsqu’on roule en groupe (et seul…) :

  • N’arrivent pas à maintenir une ligne droite (oscillations latérales constantes)

  • Effectuent des dépassements à la dernière seconde (effet domino à l’arrière)

  • Changent constamment leur rythme (accélèrent au bas d’une montée / décélèrent rendu en haut / accélèrent lorsqu’ils prennent le relais)

  • Se positionnent à des endroits risqués (leur roue avant qui chevauche / “overlap” la roue arrière)

  • sont imprévisibles…

Quelques éléments qui vous permettent d’apprendre à rouler comme un train :

  • Si vous êtes à l’avant et que vous trouvez ça “facile”, imaginez à quel point ce sera difficile de maintenir la pression constante sur les pédales pour la 2-3-4-5e personne derrière. C’est pour cette raison qu’il faut maintenir un effort soutenu, lorsque vous êtes aux avants-postes!

  • Ne laissez pas votre égo prendre le dessus! À l’avant, assurez-vous de respecter une perception d’effort qui vous permette de demeurer en contrôle de vos moyens, et ce, du début jusqu’à la fin. Tel que mentionné plus haut, ça impose de devoir ajuster la durée de ses relais. Ce n’est pas un combat de coq afin de déterminer qui prendra le relais le plus long, pour ensuite “frapper un mûr”.

  • Que vous soyez aux avants-postes ou intercalés dans les roues, maintenez une posture “relaxe”, ainsi qu’une vision panoramique. Cette dernière vous permet de mieux jauger votre ligne de déplacement, tout en maintenant un rythme de pédalage constant.

    • Encore plus important, lorsque vous prenez un relais, de regarder loin devant, tant pour vous permettre d’anticiper tout obstacle sur la route, mais surtout, pour maintenir une ligne de déplacement fluide (comme sur l’autoroute).

S’adapter aux terrains et aux vents!

Un des aspects du cyclisme qui prend le plus de temps à intégrer est celui des facteurs externes propres au vent, à sa direction, ainsi qu’à la physique du terrain. Prendre les roues implique de se positionner derrière un ou plusieurs cyclistes, et ce, afin d’économiser une grande quantité d’énergie, allant de 10-100%, selon différentes variables. En voici quelques unes, dont certaines qui vous surprendront :

  • Intercalé dans les roues, vous économisez un plus grand % d’énergie lorsque le vent est de face vs de dos. En d’autres mots, lorsque vous avez un vent de dos, chaque cycliste du groupe travaille proportionnellement plus fort. Exemple approximatif en comparant les 2 situations, au sein d’un groupe de 4 cyclistes :

    • Vent de face

      • Cycliste #1 produit 300w @ 34km/h

      • Cycliste #2 produit 230w @ 34km/h

      • Cycliste #3 produit 215w @ 34km/h

      • Cycliste #4 produit 200w @ 34km/h

    • Vent de dos

      • Cycliste #1 produit 300w @50km/h

      • Cycliste #2 produit 270w @50km/h

      • Cycliste #3 produit 260w @50km/h

      • Cycliste #4 produit 250w @50km/h

    • Il faut donc comprendre que oui, avec un vent de dos, vous allez plus vite, mais vous profitez moins de l’effet d’aspiration!

  • Lors des montées, là où la vitesse est relativement faible, et où l’effet d’aspiration est quasi-nul, il vaut mieux maintenir un rythme qui permet à l’ensemble du groupe de demeurer uni. Non, ce n’est pas uniquement pour faire plaisir à ceux et celles qui grimpent moins vite… c’est plutôt pour couvrir, ensemble, le plus de distance, et ce, le plus rapidement possible!

    • En effet, à l’opposé des montées, les descentes permettent à ceux et celles intercalés dans les roues d’économiser jusqu’à 100% de la puissance générée par ceux/celles aux avants-postes.

      • Cycliste #1 produit 350w @63km/h

      • Cycliste #2 produit 0w @63km/h (en arrêtant de pédaler / position aéro)

      • Cycliste #3 produit 0w @63km/h (en arrêtant de pédaler / position aéro)

      • Cycliste #4 produit 0w @63km/h (en arrêtant de pédaler / position aéro)

    • C’est pourquoi il faut doubler les efforts, lorsqu’on prend un relais placé dans un faux-plat descendant, sans quoi, ceux et celles à l’arrière seront soumis à l’effet d’accordéon et devront maintenir les freins enfoncés du début jusqu’à la fin de la descente (ben ben l’fun…. et pas très sécuritaire)

  • Donc, en demeurant groupé dans les montées, on s’assure de pouvoir travailler ensemble des les descentes, et ce, afin d’aller chercher la vitesse moyenne la plus élevée sur ces sections où l’inertie et l’aspiration jouent pour beaucoup!

Outils de gestion d’effort

Comme vous avez pu lire dans mon précédant article intitulé “Retour aux bases”, nous devrions tous être en mesure de gérer ses efforts, et ce, sans données externes… en se fiant exclusivement à ses repères de perception (inconfort, pression sur les pédales, souffle, etc.). Toutefois, ces mêmes outils sont d’une grande utilité, surtout lorsqu’il est question de bien gérer ses efforts en situation de groupe. La donnée de puissance, entre autres, nous permet de demeurer à une certaine intensité, et ce, peu importe le terrain (plat, montée ou descente)

C’est en appliquant progressivement ces principes, qu’au fil des heures et kilomètres, vous roulerez comme se déplace un banc de poissons… nombreux, serrés, synchronisés et sans accrocs!

Bonne route!

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